MAGMA # 9 | Les animaux et la lumière étaient la liberté même
Une proposition de Nolimetangere
Partie 1 | RITUEL INHABITUEL : un live de Hervé Boghossian
Partie 2 | FREEDOM : un film de Sharunas Bartas
Édito
Rencontres sensorielles entre des films au geste franc et des performances sonores, MAGMA est ce surgissement de force contenue, puissance tapie dans nos profondeurs pour convoquer la violence du monde et son envers. MAGMA c’est un mélange de langues, de sons, d’images « de rien », d’images « de tout ».
Les animaux et la lumière étaient la liberté même *
* Nicolas Klotz « Elégie 99 (Post) Freedom de Sharunas Bartas »
Partie 1 | RITUEL INHABITUEL : un live de Hervé Boghossian
2022 | 30 min
Hervé Boghossian – guitariste, compositeur/improvisateur – nous présentera la création de sa toute nouvelle composition pour guitare acoustique Rituel Inhabituel.
Depuis 2018, cette série de pièces dont les dernières en date sont « Green Cardigan (For Jim O’Rourke (2020), Mécanique Organique (2021), explore les possibilités de la guitare acoustique (de type folk, cordes en métal) en solo. Une approche du son de la guitare où tantôt les motifs répétés génèrent un bourdon riche en harmoniques, tantôt les résonances d’une note prennent le temps de s’éteindre jusqu’au silence. Les textures balayent le spectre sonore dans ses extrémités au moyen d’un accordage alternatif (spécifique à la pièce) permettant d’intégrer de la dissonance, mais aussi de l’émergence d’un jeu percussif ou l’utilisation de petites préparations simples. Le geste instrumental restant toujours au service de la production du son dans son épure à la recherche de niveaux d’écoute dissociés.
« Ce qui est émouvant dans le cinéma de Sharunas Bartas, c’est qu’il semble encore enfermé dans les dernières minutes du siècle dernier. Dans les échos d’une Europe post – Mur de Berlin, du temps où l’on pouvait encore entendre le silence qui a suivi sa chute ; ce silence, infini, que pouvait annoncer la fin du monde. Un monde à peine habité par les dernières visions d’Andreï Tarkovski et où le cinéma post-soviétique rivalisait avec le cinéma hollywoodien. Un monde où la fin du monde était encore possible. »
« Ce qui m’émeut dans le cinéma de Sharunas Bartas, c’est qu’il reste enfoui en moi comme une sorte de beauté inatteignable. Une beauté dure. Intraitable. Freedom est peut-être son film le plus heureux. Le plus solaire. En 1999, les animaux et la lumière étaient la liberté même. Et les hommes, étranges trafiquants de drogue ou d’autres choses, pouvaient encore essayer de passer la frontière à deux, avec une jeune femme, sans parler la même langue, sans même se parler du tout. Leur visages, leur corps, les distances qui les séparent ou qui les rapprochent, leurs silences, en disaient déjà beaucoup. Cette frontière, toujours plus difficile à passer, toujours plus dangereuse, qui sépare l’Afrique de l’Europe ; se dresse aujourd’hui comme la frontière entre deux mondes. »
« En ces temps-là, les animaux et la lumière étaient la liberté même. Les hommes aussi. Même les hommes plombés. Ils pouvaient imiter les oiseaux en tentant leur chance d’un continent à l’autre, d’un sentiment à l’autre, immigrer avec la lumière du jour et les tempêtes de sables, se perdre dans le désert. »
« Le cinéma aussi est aux prises avec cette frontière : celle du choix de l’humanité que nous désirons filmer. Et qui est sans doute la plus belle question que le cinéma pose aujourd’hui à ce siècle redoutable. »
Elégie 99 (Post) Freedom de Sharunas Bartas, texte de Nicolas Klotz, un ouvrage collectif dirigé par Robert Bonamy aux éditions de l’incidence.
Duo chant & contrebasse par Léa Bechet et Guillaume Hogan Elephant de Alan Clarke, 1989, 39 min Le Sacre du Printemps de Pina Bausch (Tanztheter Wuppertal), 1975, 37 min