Édito
Avec les corpus de films que nous proposons, les spectateurs seront en présence d’un regard, celui de la caméra, qui touche et ressent, traduit et parcourt : un regard capable de nous faire percevoir les caractéristiques spatiales d’un environnement ou d’un artefact architectural, la manière dont il se rapporte aux éléments voisins, sa couleur, le poids et la légèreté, le tissage de ses surfaces, l’air qui y circule, la relation avec l’extérieur, le non construit, le vide, le vert, le ciel. Et le temps : chaque architecture a son temps propre, qui n’est pas celui de l’ère de la construction, mais le temps relatif à l’espace dans lequel l’oeuvre architecturale est placée. Comment le cinéma, art de l’espace, peut donc rendre sensible l’architecture, art du temps ?
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Hans Poelzig’s IG-Farben Haus in Frankfurt am Main de Milena Gierke
2006-2008 | 19 min
Je considère l’architecture comme une sculpture et je la palpe avec ma caméra. Selon mon état d’esprit, elle me parle différemment à chaque coup d’œil, à chaque instant, quel que soit le temps. Filmer l’architecture est pour moi comme saisir un moment donné, exactement comme observer des gens. Surtout en ce qui concerne ce bâtiment.
Reconversão de Thom Andersen
2012 | 1h08
Chargé par le festival du film de Curtas Vila do Conde de réaliser un film dans le nord du Portugal, Andersen s’est tourné vers le travail du maître architecte Eduardo Souto de Moura (né en 1952) dont les idées visionnaires sur la structure, la ruine et le paysage lui ont valu une renommée et une audience internationale qui s’étend bien au-delà de la région de Porto où il a réalisé la majorité de ses projets. Comme en réponse à la frustration exprimée dans Los Angeles Plays Itself concernant la représentation inadéquate et dédaigneuse de l’architecture dans le cinéma populaire, Andersen a cherché de manière ambitieuse une forme cinématographique capable de comprendre toutes les dimensions des formes architecturales singulières. Pour Reconversão, Andersen s’est tourné une fois de plus, de manière ingénieuse, vers Muybridge, travaillant avec le directeur de la photographie Peter Bo Rappmund pour concevoir une technique d’arrêt sur image pour filmer l’architecture de Souto de Moura à un rythme d’une et deux images par seconde, réanimées pour allumer une impulsion et une qualité frémissantes dans le bâtiment et le paysage.
Se situant sculpturalement entre l’image fixe et l’image animée, Reconversão se déploie à un rythme contemplatif en explorant dix-sept œuvres construites et non construites, accompagnées d’une voix off (une fois encore prononcée par Encke King) lisant des passages des écrits de l’architecte et ponctuées par les interjections prudentes d’Andersen. Comme dans l’œuvre de Heinz Emigholz, le film d’Andersen va au-delà d’une simple méditation appréciative sur la vision d’un grand architecte pour mettre en mouvement un dialogue agile entre le cinéma et l’architecture en tant qu’arts de cadrage et de réinterprétation du monde existant. Ce dialogue est approfondi par la fascination constante et avouée de Souto de Moura pour ces ruines souvent incorporées de manière organique dans ses bâtiments – un processus qui n’est pas sans rappeler l’approche archéologique du cinéma de found-footage incarnée par les films d’essai d’Andersen. Traduit grossièrement par « reconversion », le terme portugais Reconversão implique bien plus : un processus hybride de conversation et de transformation qui témoigne de la dynamique complexe de l’œuvre de l’architecte et du cinéaste.
Mille cipressi de Luca Ferri
2021 | 13 min
Un homme, à l’intérieur de sa cuisine, prépare sa schiscetta parce qu’il a décidé de visiter la tombe Brion, un complexe funéraire monumental, conçu et réalisé par l’architecte vénitien Carlo Scarpa sur commande d’Onorina Brion Tomasin, pour honorer la mémoire de son parent défunt et bien-aimé Giuseppe Brion, fondateur et propriétaire de la société Brionvega, situé dans le petit cimetière de San Vito, dans le hameau d’Altivole dans la province de Trévise. Après avoir placé la nourriture à l’intérieur d’un sac en plastique à pois, nous le retrouverons en train de se promener dans le cimetière en observant avec un soin méticuleux les détails conçus par l’architecte Veneziano, tandis que dans sa tête silencieuse se logeront les précieuses paroles prononcées par l’architecte lors d’une conférence madrilène tenue durant l’été 1978.
Informations pratiques
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La billetterie ouvre 30 minutes avant le début de chaque séance.
Nous pratiquons le prix libre (chaque personne paie ce qu’elle veut/peut/estime juste).
Nous croyons au prix libre comme une possibilité pour chacun·e de vivre les expériences qui l’intéressent et de valoriser le travail accompli comme il lui paraît bienvenu.
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