Dans la continuité du cycle La révolution du désir qui a eu lieu au début du mois d’avril et en partenariat avec le collectif de cinéastes Numéro Zéro, nous vous proposons de poursuivre notre exploration du désir à travers des oeuvres cinématographiques singulières et sensibles.

C’est une rencontre. D’abord celle d’un homme et d’une femme. Un homme désirant les hommes, une femme désirante féministe.
Une rencontre de cinémas. Comment des hommes et des femmes comme nous s’emparent du cinéma pour exprimer leur relation au désir ?
Comment dire le désir et pour entendre quoi ?
L’expression du désir nous parle de notre rapport au monde face aux modèles sociaux et culturels dominants.
Désir d’aimer et d’être aimé, désir de posséder, de maîtriser, désir de perdre, de retrouver, de se fondre, de renoncer, désir de vivre, de vibrer, désir de liberté, désir de grandir, désir de jouir,…
Ce désir est multiple. Il ne va pas de soi. Il s’explore à chaque instant et bouge avec le temps.


 

Anges photophores
de Fabrice Coppin – 2018, France, 11 min

en présence du réalisateur Fabrice Coppin

 

Quelque part au Sud de l’Italie,
Au milieu du décor d’un monde en ruines, je me rapproche d’une jeunesse occupée par le seul instant présent.
Ce lieu très particulier symbolise pour moi le témoignage encore présent d’un monde violent. Il est en ruines mais il est là, très réel comme environnement immédiat. Il est donc à la fois passé et présent. On est en Italie, donc je pense au fascisme de Mussolini, à l’empire romain, à la mafia mais au-delà ça évoque pour moi toute les formes d’oppressions et leurs lots de destructions et d’asservissement.
Au milieu de ce chaos surgit une pulsion de vie que seule la pure insouciance permet de faire exister. Tout cela est éphémère et fragile mais il y a une sorte d’éternité qui se joue dans l’instant présent. Rien de peut empêcher cela d’exister. Ou peut être qu’il ne reste plus que ce moyen là pour se sentir en vie.
Me rapprocher ce ces corps masculins c’est en quelque sorte défier une oppression toujours très présente. C’est affirmer un désir dans un milieu hostile. Je fais partie à ce moment là de ce lieu avec eux. Et par cette seule présence qui nous réunit, une complicité s’installe entre eux et moi qui me permet de les filmer librement.

 

FILM SURPRISE

 

 


 

Numéro Zéro oeuvre au décloisonnement de toutes formes de cinéma en lien à la recherche infinie de ce peuple qui manque*. De la production à la mise-en-place de lieux de cinéma là où il n’y est pas, Numéro Zéro s’attache à croiser les expériences et à inventer de nouvelles formes de co-réalisations. Numéro zéro est un peu le niveau zéro du cinéma selon Eustache, son équation première : pour faire un film, il suffit d’une personne qui raconte une histoire à une autre.

Numéro Zéro fête cette année ces 10 ans et vous invite à voir des films en un cycle de programmation qui touchera à des questionnements liés en vrac et en désordre, au désir, à l’habiter, à Fernand Deligny, à une overdose d’amour, à Alger en 69, à la revue marocaine Souffle…

L’un-e dit « Nous ne saurions dire pourquoi », ce auquel l’autre répond:
« Pour le plaisir de voir et d’entendre ce que chacun-e-s pensent avoir perçu d’un monde, d’un univers.
Pour le désir de parler et de se chamailler sur ce que chacun-e-s pense avoir entendu d’une histoire, d’une intimité.
Parce que regarder des films c’est aussi en faire.
Pour mettre à l’épreuve notre capacité à aimer, gueuler, rêver, pleurer.
Ou peut-être juste pour la nécessité de se sentir vivant ensembles en accord ou en désaccord. Car vivant nous pensons l’être mais vivant nous le sommes encore plus quand nos corps et nos paroles s’entrechoquent autour d’un objet, d’un film, d’une musique avec le corps et les paroles d’autres. A ce moment-là nous pouvons en partager les sens et chercher à creuser ce que les films nous disent de « nous », de notre époque, du futur et du passé. Et peut-être, nous permettre d’affronter notre existence, le monde, et pourquoi pas, nous libérer encore encore encore… »
* « Ce constat d’un peuple qui manque n’est pas un renoncement au cinéma politique, mais au contraire la nouvelle base sur laquelle il se fonde, dès lors, dans le Tiers-Monde et les minorités. Il faut que l’art, particulièrement l’art cinématographique, participe à cette tâche : non pas s’adresser à un peuple supposé, déjà là, mais contribuer à l’invention d’un peuple. »
Gilles Deleuze, L’Image-Temps, Editions de Minuit, 1985

 


 

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