La 8ème édition du festival de premiers films documentaires, le Festival La Première Fois, aura lieu du 28 février au 4 mars 2017. Pour celles et ceux qui ne l’auraient jamais fréquenté, nous vous invitons chaleureusement à venir découvrir le travail de programmation d’une équipe hors pair, passionnée et généreuse, qui défend avec brio les premiers pas des réalisateurs et réalisatrices dans le documentaire de création.
Chaque année en février, le festival La Première Fois propose de découvrir une sélection internationale de premiers films documentaires privilégiant des regards singuliers sur le réel et de rencontrer les jeunes réalisateurs. À chaque édition un cinéaste, invité d’honneur, documentariste reconnu, présente ses films et son parcours. Cette année Claire Simon sera à l’honneur…


Édito de la 8ème édition:

« Comme il est de mise en cette période si particulière, nous vous promettons le changement. Pour cela, nous avons inventé un nouveau système,  un  système  simple  mais  efficace  où  le principal  est  que  vous  vous  sentiez  libre  de  choisir.
Nous avons tout fait pour que vous pensiez que c’est vous, spectateurs lucides et éclairés, qui choisissez d’être là en toute conscience, presque comme un acte militant.
À vous qui hésitez, qui ne souhaitez pas passer le cap, nous rappelons que notre programme est sans  concession,  qu’il  vise  un  monde  meilleur, une vie plus douce, en rupture avec tout ce que vous avez connu avant.
Surtout, n’ayez plus peur, vous êtes en sécurité entre nos mains. Nous vous promettons plus de confort,  allant  jusqu’à  vous  proposer  de  nous confier  vos  papiers  d’identité  et  téléphones  à l’entrée.
Les  enjeux  sont  primordiaux : la  fin  des  rapports de domination entre spectateurs profanes et professionnels du cinéma, la réappropriation des  moyens de production pour satisfaire  les besoins du public et non le profit d’une minorité et l’abolition des frontières de genre.
Ça y est,  vous  êtes  installés  et  prêts  à  voir  et  recevoir  le  monde  à  travers  l’œil  de  bœuf  du  festival La Première Fois. Comme chaque année, nous vous garantissons de trouver ce que vous cherchez. »
L’équipe du festival

16h : Que sont-ils devenus ?

15 ans
de Jean-Baptiste Mees – 2013, France, 35 min

Mekki, Gibril, Basile, Dane et Alex ont 15 ans et vivent aux alentours de l’Estaque dans les quartiers nord de Marseille. Il y a quelques mois, tous dans la même classe au collège, ils ont fait leurs premiers choix d’orientation scolaire…

La vie adulte
de Jean-Baptiste Mees – 2016, France, 56 min

Anthony habite une petite ville portuaire au bord de la méditerranée. À l’école il apprend à réparer des bateaux, et avec ses copains il vit mille aventures et petites histoires. Le problème d’Anthony, c’est qu’il parle trop, qu’il bouge trop, qu’il se bat trop aussi. À l’approche de ses 18 ans et de l’examen du CAP, ses professeurs lui demandent de grandir, de devenir adulte. « Changer, c’est difficile » leur rétorque‐il. Pourtant, cet été le jeune homme a découvert quelque chose à propos de lui‐même : sous l’eau, il est différent.

 

 

18h : Premier film documentaire

La route du pain
de Hicham Elladdaqi – 2015, Maroc/France/Belgique, 1h01
Séance suivie d’une discussions avec le réalisateur

Le quotidien des habitants d’un quartier populaire de Marrakech, ou le ballet toujours recommencé des laissés pour compte d’un système. Chaque jour, ils sont des milliers d’hommes et de femmes à se poster aux pieds des remparts de la Médina pour quémander du travail. Ils sont les petites mains, la cheville ouvrière indispensable à l’essor économique d’une ville portée par une industrie touristique florissante.

21h : Premier film documentaire

Belle de nuit – Grisélidis réal, autoportraits
de Marie-Eve De Grave – 2016, France, 1h14
Séance d’une discussion avec Simon Arazi, monteur du film

Entre la Suisse où éclot et s’achève un parcours de vie insolite, une maison de prostitution et la prison à Munich, la lutte militante à Paris ou la vie à Alexandrie, s’esquisse le portrait de Grisélidis Réal, figure incontournable de l’histoire genevoise récente. S’affirmant au cours des années 1970 comme l’une des meneuses de la « Révolution des prostituées » à Paris pour défendre la perspective de la prostitution comme choix, elle renchérit sur ce positionnement dans ses écrits : « La prostitution est un acte révolutionnaire « (GR). Une science et un humanisme surtout, pour une femme passionnée et libre, profondément féministe de façon aussi personnelle qu’individuelle. Bâti sur de très riches archives, un récit au souffle romanesque, porté par un montage remarquable et par la fureur de vivre d’une héroïne contemporaine : « Que celui qui n’a pas véritablement aimé jette ce livre à la poubelle. Il y sera plus au chaud et au tendre dans les ordures que dans ses mains « (GR).
Reste son épitaphe, manifeste du triomphe de la volonté : « Grisélidis Réal, Ecrivain – Peintre – Prostituée ». Emilie Bujès

 

Critique de Belle de nuit – Grisélidis réal, autoportraits par Thomas Denis


 » « J’existe dans plusieurs mondes en même temps. Je suis perpétuellement extensible, habitée, imagée. Je ne m’appartiens  pas. » Même après sa mort,  Grisélidis Réal  (1929-2005), icône ambivalente et romanesque, continue d’exister à travers ses romans autobiographiques, ses engagements toujours d’actualité et l’imagerie qui lui est consacrée. Suisse de milieu bourgeois au sang gitan réduite à la prostitution pour nourrir ses enfants – devenue  écrivaine en prison, puis porte-parole du mouvement des prostituées dans les années soixante-dix  –  , elle est à elle seule une galerie de portraits.

Pour figurer la complexité de sa « belle de nuit » sans la trahir, Marie-Ève de Grave en embrasse  toutes  les  facettes. La réalisatrice prête sa voix à Grisélidis et lit ses textes tout au long du film, colle ses mots sur des matériaux d’archive variés. Ainsi incarnée à l’écran, sa muse se raconte en hédoniste trash, amoureuse passionnée, mère  bohème, écrivaine tourmentée, prostituée engagée, poétesse rêveuse, amante maltraitée… Grisélidis Réal était prête à faire le choix de la souffrance plutôt que de porter le masque figé et froid de l’aliénation, d’endosser le fardeau des existences résignées.

À travers de riches archives photographiques et sonores, des extraits d’interview, dessins et found footage, la  réalisatrice met en scène et multiplie les perspectives pour dépeindre l’intensité d’une femme tout en clair-obscur. Dans une séquence poignante,  Grisélidis  sur fond noir, d’une beauté pénétrante, partage les sensations  brutes qui la traversent après une passe. Le dégoût qu’elle exprime révèle une vision presque écologiste de la souffrance humaine :  « Si au moins on était des bêtes. » Dans une danse tzigane  enivrée,  on  la  retrouve militante radicale et rebelle, crachant avec gouaille sur l’hypocrisie de l’ordre établi qui menace  à  ses  yeux la profession de prostituée : « Il y en a qui devraient aller se faire baiser sous peine de mort. Si on ne baise pas, on crève. »

> Lire la critique en entier

 

 


 

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