CinExpé, c’est un rendez-vous mensuel dédié à la fabrique du cinéma aujourd’hui dans ses tentatives, ses détournements, ses pieds de de nez, ses coups de gueule, ses expérimentations visuelles. C’est un rendez-vous vivant puisqu’il est chaque fois porté, par les artistes et créatrices elles-mêmes, par des passionnés critiques…

Apposer des fleurs sur la pellicule, ensevelir le film, bricoler des dispositifs d’observation, laisser la caméra être affectée par les forces naturelles, monter le film au rythme d’une transe chamanique : les écologies du cinéma expérimental présentées dans cette séance constituent des formes de pratiques et d’engagements qui éveillent à une sensibilité accrue au vivant. Dans notre époque géologiquement troublée, l’Anthropocène, ces films optent pour des liens de coopération, confiant aux existants non-humains les rôles de sujets et d’agents des processus filmiques.

Pour cette séance, qui accompagne la publication d’une première anthologie sur les écologies du cinéma expérimental, le cinéaste hollandais Karel Doing est notre invité d’honneur, au côté du directeur d’ouvrage Elio Della Noce. Chercheur indépendant et fondateur du laboratoire historique Studio één , Karel Doing œuvre depuis trente ans à déplacer l’idée d’une économie vers celle d’une « écologie » de la fabrication du film. Il réemploie les machines et outils, imagine des procédés de développement organiques, explore par voie photochimique des modes de communication avec la matière vivante et vibrante, qu’elle soit végétale, limoneuse, ou poussiéreuse.

Trois de ses films, associés à ceux de Chris Welsby, Jennifer Reeves et du collectif autochtone mexicain Colectivo Los Ingrávidos, seront projetés, comme autant de manières de concevoir une éthique de la production et de laisser parler la ou plutôt les natures.


// 1ère partie // (31 min)

Wilderness Series

de Karel Doing, 2016, 14 min

En utilisant des plantes, de la boue, du sel avec de la photochimie alternative, des images poussent sur le film. Ce qui en première instance semble être abstrait se révèle être des bribes de phénomènes concrets qui nous entourent dans notre quotidien. La ‘vivacité’ de l’image est mise en valeur par la conception sonore d’Andrea Szigetvari.

The Mulch Spider’s Dream

de Karel Doing, 2018, 14 min, 16mm

À quoi peut bien ressembler la vie d’une araignée ? Une créature vivant dans le même environnement que nous, mais dont l’expérience est radicalement différente de la nôtre. Le film essaie de rendre compte d’un monde non-humain à travers la forme, la couleur et le rythme. Les images simili-abstraites sont réalisées au moyen de substances actives végétales qui interagissent directement avec l’émulsion photographique, un type d’image que j’ai baptisé « phytogramme ».

A Perfect Storm

de Karel Doing, 3 min, 16mm

Un film de paysage ou, plus précisément, un paysage imprimé sur l’émulsion du film. L’artiste a utilisé des graines, de minuscules fleurs composites et d’autres petits éléments de plantes cultivées qui poussent dans son jardin et des espèces végétales sauvages récoltées dans une réserve naturelle voisine.


// 2ème partie // (26 min)

Stream Line

de Chris Welsby, 1976, 8 min, 16mm

« Ce film est un travelling continu, en « temps réel », du lit d’un cours d’eau. La longueur de la piste était de dix mètres. La caméra était suspendue à un chariot motorisé fonctionnant sur des câbles en acier à un mètre au-dessus de la surface de l’eau. La caméra pointait verticalement vers le bas, enregistrant les contours du lit du cours d’eau et l’écoulement de l’eau le long de son cours. Le bruit de l’eau était enregistré de manière synchrone depuis le chariot en mouvement.

Le « drame » de ce film provient de la topographie du cours d’eau et non du mouvement de la caméra ou du montage. Pendant toute la durée du film non monté, la caméra suit une ligne droite à une vitesse absolument régulière. En revanche, le cours d’eau s’écoule rapidement et lentement, tombant en cascade sur des rochers et tourbillonnant de gauche à droite.

Je considère la ligne droite formée par le dispositif de suivi comme une métaphore de la technologie. Cependant, la ligne droite ne domine pas le paysage comme une autoroute ou une rangée d’immeubles ; dans ce modèle, la ligne droite est utilisée comme un moyen d’articuler la complexité de la nature. »

Landfill 16

de Jennifer Reeves, 2010/2011, 9 min, 16mm

Un film 16mm exhumé de ma propre « décharge » dans l’Indiana constitue la toile de fond de ‘Landfill 16’. À la suite de ma double-projection ‘When It Was Blue’, j’étais terrifié par la quantité de chutes qui devaient normalement finir à la décharge. J’ai donc enterré temporairement la pellicule, pour laisser les enzymes du sol commencer à dégrader l’image, puis j’ai repeint le film à la main pour lui donner une nouvelle vie. J’essaie, dans ce film abstrait, d’exprimer mon inquiétude à l’égard du gaspillage humain. Ce « recyclage » est une méditation sur la vaine lutte de la nature pour décomposer les reliques de nos technologies et productions abandonnées.

Danzas lunares

Colectivo los Ingrávidos, 2020, 9 min

Quelques évocations des cycles de Coyolxauhqui, la déesse de la Lune, qui furent jadis associés à une danse.


Informations pratiques 

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PRIX LIBRE

Nous souhaitons que le cinéma demeure accessible à toutes et tous. La curiosité, et le plaisir des images ne doivent pas être un privilège. Les projections engendrent des coûts de diffusion, c’est pour cela que nous conseillons le prix de 5€.

L’adhésion annuelle à l’association est nécessaire pour assister aux séances. Elle est accessible à partir de 5€ et valable sur une année civile.

 

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