À l’image du sanglier qui traverse la route comme sorti d’un conte, je ne sais plus par où les choses commencent, de quoi elles se nourrissent : si le film naît de la vie, ou la vie du film tendanciel et permanent d’un mythe de tout instant. Simplement, du fait de l’attention, du cadre et du regard de Pierre, qui transfigure chaque objet, chaque animal, chaque ami, à l’instant de son apparition.
Construire, Marcher, Raconter, Mathilde Girard
Aucun des films de ce cycle ne commence par Il était une fois. Pourtant, de Polichinelle aux chasseurs Gao, des pirouettes d’un chat maléfique aux paroles de Shéhérazade, c’est bien d’une voix qu’adviennent les histoires en train de se construire, celles que les films inventent en même temps en images. Ces films seraient pour ainsi dire la tentative d’une diction cherchant à apprivoiser une histoire latente, dont on ne sait jamais si elle est écrite ou non. Elle proviendrait à la fois d’un conte millénaire et d’un fait divers et y serait alors poreuse la frontière entre l’archive, le témoignage et la fabulation.
Des personnages masqués, des paysages enchantés et une voix narrative. Tout porte à croire que les films de ce cycle sont une mise en scène d’un conte merveilleux. Cependant, masqués ou surnommés, les personnages traversent les temps ancestraux et rencontrent par le même chemin des paysages contemporains. Dans Bella e Perduta, le Polichinelle de Pietro Marcello parcourt la campagne napolitaine désolée et oubliée. Dans Les Mille et une nuits de Miguel Gomes, Shéhérazade commence à conter depuis l’un des chantiers navals fraîchement fermés de Lisbonne, au cœur de la crise économique. Dans la première partie de In the dark, un chat malmène un vieillard renfermé dans son petit appartement. L’histoire aurait pu rester fantaisiste si le vieil homme n’était pas sorti distribuer ses filets dans la rue. On saisit ici la dure réalité d’une banlieue froide de Moscou. On part d’un territoire, d’un groupe qui l’habite, un peuple qui prend forme avec lui. Alors les décors n’en sont pas. Des histoires existent, nous précèdent et nous environnent.
Nous pensons que ces films sont d’abord nés du désir de transporter ces histoires ailleurs, en d’autres lieux.
Si ni Jean Rouch ni Arne Sucksdorff n’ont écrit de scénario, c’est qu’il leur a plutôt fallu plusieurs années pour filmer ce qui leur était inconnu – ces « pays plus loin que loin » -, plusieurs années pour rencontrer les gens qui y vivent et adopter leur regard afin de parvenir à mettre en images leurs histoires. Mais celles-ci sont d’abord faites pour être écoutées. Car avant même de voir les personnages, c’est une voix que nous entendrons. Cette voix, qui parcourt tous les films en métamorphosant ce qui se déroule sous nos yeux.
« Les enfants, au nom de Dieu, écoutez, écoutez l’histoire de Gaway-Gaway, l’histoire de vos pères, de vos grands-pères, des chasseurs Gao », nous apostrophe Jean Rouch avant même la première scène de son film.
De cette voix débutera chaque récit…
Les séances du cycle À voix contées
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