Dans ce premier volet du cycle « Des cinémas d’Afrique(s) » concocté par l’équipe du Videodrome 2 avec l’aide précieuse de Sofi Delaage, nous avons choisi de commencer par le début, avec des films de la première génération de cinéastes africains. Les cinémas d’Afrique(s) sont divers, et cinq séances ne suffisent évidemment pas à en montrer la richesse. Les films de ce cycle ont en commun d’être des fictions qui nous ont marqués en tant que spectateurs/trices, et qui montrent d’autres images d’un continent médiatiquement mal traité.
Soleil ô
Med Hondo – 1969, Mauritanie, 1h38
Tourné avec un maigre budget, distribué plusieurs années après, ce film trace le portrait d’un immigré noir qui monte à Paris “au pays de ses ancêtres les Gaulois”. Ce film-manifeste dénonce une nouvelle forme d’esclavage : l’immigré essaie désespérément de trouver un travail, un logement, mais doit faire face à l’indifférence, le rejet, l’humiliation. Jusqu’au hurlement final de révolte.
Un immigré africain en quête de travail, découvre les aspérités de la “Douce France”, le racisme de ses collègues, le désintérêt des syndicats et l’indifférence des dignitaires africains qui vivent à Paris, au pays de “nos ancêtres les Gaulois”.
Un cri de révolte contre toutes les formes d’oppression, la colonisation et toutes ses séquelles politiques, économiques et sociales ainsi qu’une violente dénonciation des fantoches installés au pouvoir dans beaucoup de pays d’Afrique par la bourgeoisie française.
Soleil Ô est le titre d’un chant antillais qui conte la douleur des Noirs amenés du Dahomey aux Caraïbes.
Léopard d’or au Festival de Locarno en 1970
Med Hondo est né le 4 mai 1936 à Ain Beni Mathar (ex berguent Maroc). Issue de la tribu des Barikalla, grande tribu maraboutique du nord. Une de ses grands-mères est originaire du Mali, son père est originaire du Sahara Occidental. Il s’installe en France en 1959. Docker dans un premier temps (tout comme le cinéaste sénégalais Sembène Ousmane), puis cuisinier, il découvre alors le théâtre, et s’inscrit aux cours d’art dramatique chez Françoise Rosay, où il joue comme acteur dans de nombreuses pièces (Shakespeare, Tchekhov, Kateb Yacine, Aimé Césaire, Brecht, etc.), puis participe à la création du Comité africain des cinéastes, pour fonder un peu plus tard, en 1966, sa propre troupe, Griotshango.
Il s’initie également au cinéma en tournant deux courts-métrages : Balade aux sources et Partout ou peut-être nulle part. Il joue notamment dans deux films, Un homme de trop de Costa-Gavras, en 1966, et Promenade avec l’amour et la mort de John Huston, en 1969.
En 1965, il écrit le scénario de Soleil Ô, un film qu’il réalise alors avec un budget très restreint, puisque les acteurs sont bénévoles, sur la condition des ouvriers immigrants, qu’il termine en 1969. Défini par l’auteur comme “10 ans de gaullisme vus par les yeux d’un Africain à Paris”, il remporte divers prix et est sélectionné à Cannes mais interdit par la suite, pour des raisons diplomatiques, dans divers pays.
Malgré cela, Med Hondo continue son travail de réalisateur, examinant le colonialisme et le post-colonialisme. En 1973 sort Les Bicots Nègres vos voisins, toujours sur le thème de la vie des immigrés et du racisme en France.
En 1977, il tourne un film sur la lutte du Front Polisario, Nous aurons toute la mort pour dormir.
En 1979, il revient à son thème initial avec West Indies, les nègres marrons de la liberté, un récit sur l’esclavage et le colonialisme dans les Caraïbes. Hondo qualifie lui-même le film de » music-hall tragi-comique « .
En 1986, il décroche le grand prix du Fespaco au Burkina Faso et le prix du meilleur film au festival de Londres avec Sarraounia.
En 1994, sort Lumière noire, puis en 2002 son dernier long métrage Watani, un monde sans mal.
En 2003, il met en scène la pièce de théâtre La guerre de 2000 ans de Kateb Yacine.
À côté de tout cela, il est également acteur et producteur et dirige la Société des acteurs, réalisateurs et producteurs français.
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