Après Accident de Joseph Losey projeté le 21 septembre, Edvard Munch, la danse de la vie est le deuxième film montré dans le cadre de ce ciné-club sporadique. Accident – qui ouvrait cette programmation – est construit comme un dessin trop beau qu’on a déchiré en mille morceaux et jeter en l’air. Les bouts de papiers tombent comme une neige et se reflètent les uns sur les autres avant de tamiser le fond de la pièce. Le corps du film c’est cette chute, cet accident qui ne cesse de se refaire, son fil secret ce sont des jeux de pouvoir qu’on a voulu oublier. On nous donne à voir l’écroulement d’un monde qui n’arrive jamais. Le tableau qu’on pensait limpide s’avérait être gorgé de tâches, de trous noirs, où s’infiltrait la petite lâcheté des hommes. À la fin du film, devant nous, en morceaux sont étalés ou abattus « l’unité de la famille et de la personnalité, de la morale sexuelle et de l’honorabilité sociale ».
Edward Munch, la danse de la vie correspond avec Accident sur ce plan de l’éclatement. Mais cette fois on a abandonné les mécanismes d’horloger. La précision se trouve ailleurs, sur un plan quasi holistique (comme dirait les gourous), tant le film tient du miracle. La brutalité disparate des traits, la protéiformité impure des régimes d’images convoqués, qui alternent le sublime avec des interviews filmés à la manière des faits divers à la télé, la polyphonie sans centre d’énonciation, tout concorde pour former une cacophonie. Rien. On se trouve à l’étrange carrefour entre Orson Welles, la sociologie, le cinéma militant et Le Temps retrouvé. Une seule question subsiste : comment ça tient. C’est ce que nous demande sans cesse ce regard caméra appuyé que pose Munch, comme posé juste à côté des choses. C’est ce que dit aussi cette voix d’outre-tombe cassée par les larmes et l’alcool qui ponctue les désespoirs du jeune peintre. Ce qui est en cause c’est sa disparition, ou plutôt cette nouvelle manière d’être -qui éclos à la fin du dix neuvième siècle- qu’est la disparition. Cette dispersion ne l’anéantit pas , mais ne nous montre de lui qu’une pluralité d’opinions, de positions. Ce qui l’amène à fuir sa famille comme un fantôme, ce qui le conduit vers les barbouillages anarchistes, ce qui le maintient dans un romantisme obscure puis l’entraîne dans les cabarets de Paris, on ne le sait qu’à moitié. Par contre on sait: ce qui l’arrime à la vie, c’est son geste – jamais on n’avait aussi bien filmer l’acte de peindre tel qu’il brille à l’instant d’un péril.
Edvard Munch, la danse de la vie de Peter Watkins
1974 | Suède | 2h54
Biographie très subjective des jeunes années du peintre norvégien expressionniste Edvard Munch, aux prises avec les conventions de la société puritaine de son temps.
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